Matthieu Richez – Game Designer et CEO chez CCCP

  • 1) Matthieu, en premier lieu, pourrais-tu nous expliquer ton parcours ?

  • Après mon bac S, j’ai démarré par une prépa d’école d’ingé en informatique, puis j’ai bifurqué vers SUPINFOGAME à Valenciennes, la première année où l’école a ouverte, pour étudier le game design et la gestion de production. Diplôme en poche, j’ai fondé il y a 12 ans maintenant mon propre studio avec quelques autres acolytes.

  • 2) J'aimerais que l'on s'intéresse plus précisément à ton poste de co-fondateur de CCCP. Quelle dynamique vous ont fait ouvrir votre studio il y a 12 ans ?

  • Il y a 12 ans, on était en plein dans une énième crise du secteur en France, beaucoup de studios fermaient, les modèles économiques changeaient… Un de nos profs nous a parlé du Serious Game, soit l’utilisation des techniques du jeu vidéo mais pour faire passer des messages « sérieux ». On a trouvé le principe excellent et détecté une opportunité de marché, car dans l’absolu toute boîte de tout secteur peut avoir besoin à un moment d’un serious game. Bref, nous nous sommes lancés avec l’ambition d’avoir une double activité : proposer nos services dans le serious game, et développer des jeux en parallèle.

  • 3) On sait que de nombreux studios ferment leurs portes après 2 ou 3 ans. Comment expliques-tu la longévité de CCCP ?

  • L’intérêt de notre double activité, c’est que chacune a pu remplacer l’autre aux bons moments... La prestation de service nous a globalement maintenu à flot pendant des années, mais à certains moments où les commandes se faisaient rares, pouvoir basculer sur des projets de jeux vidéo a permis de sauver le studio. Et inversement. Et arriver à durer permet de débloquer beaucoup de choses : on arrive à se créer un portfolio de projets qui deviennent notre meilleur argument commercial.

  • 4) Quelles étapes importantes ont, d'après toi, jalonné votre développement ?

  • Instinctivement, j’ai trois dates en tête : - En 2009 nous avons remporté un appel à projet national dans le cadre du plan de relance, et avons pu financer un superbe projet appelé Ludomedic, des jeux explicatifs à destination des enfants malades. Ca nous a donné un vrai coup de boost, à tous niveaux. - En 2011, dans le même ordre d’idées on a fait rentrer un groupe d’investissement dans le capital de la société, et on a embauché notre premier senior. On est alors passé à une vingtaine de salariés. On a structuré beaucoup de choses à ce moment-là. - En 2014, on se pose une grosse question existentielle sur notre stratégie pour les jeux vidéo, et on décide de lancer de nouveaux projets internes de jeux non plus dictés par la mode des modèles économiques en vogue (free to play, casual games, etc…), mais des jeux auxquels on aimerait nous-même jouer. Ca a été le début d’une aventure géniale et un nouveau coup de boost pour la société, qui continue encore maintenant. C’est à ce moment que nous avons ouvert un deuxième bureau, à la Plaine Images à Tourcoing.

  • 5) [Instant PUB] : Après le joli succès de votre jeu Dead In Bermuda, sur Steam (91% d'évaluations positives), que nous réserve prochainement CCCP ?

  • Nous travaillons actuellement (avec acharnement…) sur sa suite spirituelle, Dead In Vinland, qui sort d’ici début d’année 2018 sur Steam. En se basant sur les réussites du premier, et les retours de la communauté, on a revu les ambitions à la hausse (l’intégration d’un système de combat par exemple). On espère que ça va vraiment marcher, car on a mis tout notre cœur à améliorer ce qu’on n’avait pas pu faire dans le premier, faute de moyens. On est en tous cas plutôt fiers du résultat, et on est super impatients de voir les retours des joueurs !

  • 6) Quel regard portes-tu sur l'industrie du jeu vidéo, en cette fin 2017, lorsque l'on est un studio indé ?

  • Le marché est compliqué… La barrière à l’entrée est beaucoup plus basse, le marché est inondé de jeux. Certains font des cartons impossibles à prévoir, beaucoup d’autres sont de très gros flops commerciaux. Je pense qu’il faut avoir une vision à plus long terme que juste se dire « je sors un jeu et on verra après ». Il est nécessaire de se construire un portfolio et essayer de s’inscrire dans la durée.

  • 7) Enfin, le conseil du Chef : Quels conseils pourrais-tu formuler à une jeune équipe de passionnés désireuse d'ouvrir son propre studio ?

  • Le plus important, ce sont les gens. Réunir la bonne équipe composée de personnes qui ont les compétences nécessaires, et avec lesquels vous avez envie de passer plus de 50% de votre temps, c’est déjà l’étape la plus dure. Pour le reste, il suffit juste d’être sérieux, travailleur, et considérer ce métier de manière professionnelle.


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